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Transcription et arrangement

Qu’est-ce qu’un arrangement ? Le mot suppose un original, modifié et adapté. Dans le jazz et les musiques balkaniques, l’arrangement est la raison d’être d’une grande partie de la pratique musicale. Il côtoie la « composition » et ce qu’il est convenu d’appeler « les standards ». Autrement dit, dans la majeure partie des cas, une composition - ce que le public considère comme tel - est aussi un arrangement et un arrangement - au dire de plusieurs jazzmen que je connais - est alors la composition d’un arrangeur.

Dans les musiques mentionnées ci-dessus, comme dans la musique Renaissance et Baroque, la composition est un ensemble de données que les musiciens doivent adapter - plus ou moins - aux circonstances. La confrontation de ces pratiques - adaptation, arrangement - aux compositions pose aujourd’hui la question de la valeur et de la fonction de l’écrit, de la fixation sur le papier : conséquemment qu’est-ce qu’une œuvre ? On parle volontiers de chef-d’œuvre, œuvre de la tête et non œuvre faite, concrète. Quels rapports entretiennent la partition et sa restitution ?

De nos jours le texte musical est souvent considéré comme « sacré » et les arrangements facilement acceptés dans le milieu de la musique ancienne sont ceux de la période historique (Bach arrangeant Vivaldi ou ses propres œuvres, par exemple). Le travail d’adaptation du répertoire Renaissance comme les mises en tablatures d’œuvres vocales pour luth ou claviers n’est pas toujours perçu comme entrant dans cette catégorie, puisque c’était à cette époque la manière « normale » de faire de la musique pour les instrumentistes. D’autre part, de nos jours, le respect pour l’original ou pour la pensée du compositeur fait que l’arrangement est souvent perçu comme une dégradation d’une partition écrite idéale restituée autrefois dans un contexte lui-même idéal que la musicologie nous aiderait à retrouver.

Mais l’arrangement est un aspect normal de la pratique musicale jusqu’au xxe siècle et côtoie l’évolution de plus en plus restrictive de la notion d’œuvre musicale, dans la mesure ou les compositeurs essaient de fixer de plus en plus les paramètres divers de la restitution.

Le cornettiste confronté au répertoire prend l’habitude, comme le lui indiquent les sources, particulièrement à la Renaissance de s’approprier le répertoire écrit pour voix, luth ou instrument à clavier. La partition est simplement l’indication d’une structure musicale écrite selon des usages et pour une fonction concrète spécifique. Au xvie siècle, l’appropriation ou la reprise partielle ou totale d’une œuvre d’un compositeur par un autre étaient perçues comme un hommage du dernier au premier. Une question se pose alors : le compositeur n’avait-il qu’une chose en tête ? Ou n’a-t-il fixé qu’une des solutions possibles et fait éditer la composition selon les convenances et les normes d’écriture de son époque ? De ce fait se pose la question de la marge de liberté que peut s’autoriser le musicien-interprète.

J’ajoute à cela que le répertoire des ensembles instrumentaux professionnels (Stadtpfeifer, Ménestrels, Waights, etc.) a rarement été transmis : ces musiciens jouaient et adaptaient le répertoire en vogue, preuve en est la conjonction qui existe entre les méthodes de diminutions et certaines éditions de compilations - Canzoni italiennes de 1577 et 1588, recueils de chansons à 3 voix de 1569.

Au xviiie puis au xixe siècle, le phénomène de l’arrangement édité et formalisé prit de l’ampleur. Qu’en était-il au niveau de la pratique ? Les grands succès d’opéras, de symphonies ont tous été transcrits pour piano…Trahison ? A une époque où les moyens de reproduction sonores n’existaient pas, la transcription s’imposait comme le seul mode de large diffusion de la musique.

Qu’en est-il aujourd’hui ? Que voulons-nous, qu’acceptons-nous d’entendre ? Seulement « l’original » ? La partition nous le livre-t-il ?

 

 

Festival 2007   -   Transcriptions

 

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